ANALYSE – Covid 19, sauvegarder les entreprises et anticiper les opportunités futures

Publié le 12 juin 2020

L’économie mondiale vient de subir un choc extraordinaire du fait de la pandémie. Dans ce contexte, les organisations membres du réseau ANIMA, en charge des questions d’attractivité de leur territoire et de développement des entreprises, tentent d’accompagner au mieux les conséquences et d’anticiper le futur.

La priorité est évidemment de soutenir les entreprises, identifier leurs besoins et leur faciliter l’accès aux multiples services d’aide et de sauvegarde offerts par la plupart des gouvernements. Il faut en particulier veiller à ce que ce soutien soit accessible. Mieux vaut un soutien modeste et limité, simple d’accès avec des critères d’éligibilité clairs et un appui immédiat, plutôt que des annonces de soutien massif destinés en fait à une cible limitée, ou lent à être réellement fourni.  

Comme dans toute crise, il y aura des gagnants et des perdants et de nouveaux domaines vont émerger. Il est encore trop tôt pour savoir quelles entreprises sortiront gagnantes de la crise et accompagneront la reprise. Mais les membres de notre réseau ont un rôle à jouer pour les faire émerger. Pendant la crise, nous avons vu de nombreuses solutions émerger dans les start-ups, grâce aux incitations publiques.

Ce fut le cas, par exemple, en Tunisie, où le ministère de la santé a lancé le Health Tech Challenge. De nombreuses start-up méditerranéennes, et ANIMA soutient actuellement 120 d’entre elles dans ses programmes, devront pivoter pour survivre à la crise et se développer. Nous leur apportons actuellement un soutien adapté dans cette perspective. Rappelons que Uber, WhatsApp, Instagram, Pinterest, Dropbox, Slack, Groupon, Venmo, Zendesk, Wordstram, Cloudera ont toutes été fondées lors de la dernière crise, entre 2007 et 2009.

THE NEXT SOCIETY

Mais les groupements d’entreprises pourraient jouer un rôle important dans le développement de projets à grande échelle en organisant la collaboration entre leurs membres. Ce fut le cas au Maroc, par exemple, où le cluster CE3M (électronique et mécatronique) a formé un consortium pour développer le premier ventilateur artificiel basé sur des composants 100% disponibles dans le royaume. 

Le cluster marocain C2TM (textiles techniques) et ses membres se sont également mobilisés pour lancer la production de masques barrières et fournir aux Marocains des produits de protection contre le virus Covid-19.  

Ces clusters bénéficient également du programme de soutien coordonné par ANIMA dans le cadre de notre initiative THE NEXT SOCIETY. Un cas très intéressant de nouveau service développé par une agence pour soutenir l’émergence de nouvelles opportunités d’affaires liées à la crise est le lancement d’une place de marché en Catalogne (Espagne) par l’agence ACCIÓ, pour soutenir les collaborations et les rapprochements entre grandes et petites entreprises ainsi que les clusters.

Tout ce soutien offert doit également être l’occasion pour les acteurs publics de renouveler le partenariat entre leurs pays ou leur territoire et les entreprises, et de discuter de questions telles que les retombées locales, la responsabilité sociale, l’impact durable. C’est le sens de notre nouvelle initiative, Impact Invest, que nous avons lancée pendant cette période de confinement.

On entend aussi parler de relocalisation, et certaines agences se préparent à faire revenir leurs entreprises basées à l’étranger, mais je ne peux pas croire à une vague de désinvestissement massif depuis le sud de la Méditerranée. Ces pays conservent en effet leurs principaux atouts : ils offrent des gains de compétitivité, des relais de marché, et une proximité avec le marché européen. Pour ces raisons ces relocalisations, si elles ont lieu, seront probablement limitées à des secteurs stratégiques pour lesquels une production souveraine est considérée comme essentielle.

Anima optimise les solutions alternatives

Impact Invest
Sessions du Project Lab : ateliers d’intelligence collective organisés par ANIMA pour co-construire le plan d’action de sa nouvelle initiative, Impact Invest.

En ce qui concerne les activités d’ANIMA, nous avons dû nous aussi réagir en peu de temps. Tout le personnel a commencé à travailler à domicile depuis le 17 mars. Microsoft Teams avait été mis en place comme outil de collaboration l’été dernier, mais cette période a donné un véritable coup de fouet à l’adoption de ce mode de travail et de communication entre nos collaborateurs.  

En moins d’une semaine après notre fermeture en France, tous les pays coopérant avec ANIMA étaient dans la même situation et tous nos collègues et partenaires travaillaient depuis chez eux. Le 5 avril, nous avons lancé un groupe en ligne pour offrir à nos membres un espace d’échange sur leurs réponses à la crise, leurs nouvelles, et surtout pour échanger sur les stratégies des entreprises.

Dans l’intervalle, l’équipe s’est employée à adapter notre plan de travail à la situation, principalement en enquêtant sur la situation chez nos partenaires et bénéficiaires et en faisant migrer un certain nombre d’activités en ligne. Et cela se poursuit toujours. Nous avons également publié un guide comparant les outils numériques sur le marché afin d’organiser différents types de réunions pour faciliter la migration des services par nos membres.

Pendant la période de confinement, ANIMA et ses partenaires ont utilisé tout le potentiel des outils numériques et ont mis en place près d’une dizaine d’événements : des webinaires d’échange d’expérience liés à la crise, des bootcamp pour promouvoir les start-up basées sur la recherche auprès de partenaires industriels, une série de formations numériques pour un cluster marocain et le lancement d’un programme de tutorat en ligne pour ses membres, et une série de réunions en ligne d’intelligence collective pour préparer notre nouvelle initiative Impact Invest, en partenariat avec l’Union pour la Méditerranée, la coopération allemande et la Région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Des séminaires sans se déplacer

Même si la pandémie a été moins meurtrière au sud de la Méditerranée, nos voisins partagent notre traumatisme et les déplacements internationaux seront très limités cette année. Nous venons de soumettre à nos administrateurs un plan de travail alternatif pour nos séminaires de formation destinés aux organismes de promotion des investissements, que nous migrons vers le numérique pour tout le reste de l’année, avec un cycle de huit webinaires entre juin et décembre.

Nous commencerons par les préoccupations immédiates comme « la communication en temps de crise », « la numérisation des services aux entreprises », « l’assistance et les mesures de sauvetage des entreprises » et nous élargirons le programme à des sujets plus prospectifs comme « l’intelligence et la veille stratégique ».

Nos principales préoccupations sont d’essayer collectivement d’appréhender l’avenir et de maintenir le lien et la coopération entre nos communautés dans une période où certains pays sont encore confinés et où les vols transcontinentaux ne repartiront pas avant l’automne.

Emmanuel Noutary
Délégué général, ANIMA Investment Network

Lire l’article dans le Dossier spécial COVID-19 d’Econostrum, l’actualité économique en Méditerranée